Critique :
Attention chef d’œuvre ! La Guerre Eternelle est l’un de ses romans de SF que tout bon amateur de ce genre littéraire se doit de posséder dans sa bibliothèque.
L’auteur, Joe Hadelman est un vétéran du VietNam qui a décidé un jour de raconter son expérience de la guerre sous la forme d’un bouquin de SF. Choix judicieux, qu’il lui a permis de produire une œuvre universelle sur l’absurdité de la guerre.
Le roman nous conte l’histoire de William Mandella, depuis son incorporation jusqu’à sa démobilisation plusieurs millénaires plus tard. Car William Mandella semble engagé dans une guerre qui semble partie pour l’éternité. Non pas qu’il s’agisse d’un soldat doté d’une longévité exceptionnelle, mais bien, parce que Hadelman a choisi de rester dans le cadre de la relativité einsteinienne pour ses voyages spatiaux. Plus on approche de la vitesse de la lumière, plus le temps passe vite à l’extérieur du vaisseau.
L’horreur des combats vécue par Mandella se double ainsi du traumatisme procuré par ses retours sur terre lors de ses permissions. Le soldat découvre alors un monde qu’il ne comprend plus, plusieurs centaines d’années peuvent s’être écoulé depuis son départ. Il est obligé alors de vivre dans des sociétés au sein desquels il ne parvient pas à s’intégrer. Finalement, il ne lui reste plus d’autres choix qu’à resigner, résigné, pour retourner se battre sur des planètes lointaines afin d’échapper à cette humanité future.
Le roman fait preuve d’un grand réalisme, d’un désespoir profond et nous présente la guerre comme une chose absurde qui provient du racisme primaire et du manque de communication entre les peuples.Nous nous trouvons au plus loin des guerres relatées dans les space opera classiques, ici pas de haut fait d’arme, ni de héros armés de fulgurs qui affrontent des hordes d’envahisseur, le sourire aux lèvres. Nous sommes confrontés à des hommes et des femmes ordinaires transformés par la force des choses en machine à tuer, conditionnés psychiquement à détester leur ennemi, un ennemi, qui, sous la plume d’Hadelman, n’est pas un monstre extraterrestre, mais une forme de vie consciente, pas très différente des humains, qui souffre aussi de cette guerre interminable. Et tous ses combattants portent dans leur chair et dans leur esprit, les horreurs qu’ils ont vécues ainsi que celles qu’ils ont commises dans le feu de l’action, sous l’influence de leur armure de combat.
Une question reste posée à la fin du roman, comment ceux qui ont vécu une telle guerre peuvent espérer par la suite retourner à la vie civile, dans un univers où tous leurs repères ont disparu, où l’humanité n’est même plus réellement l’humanité, suite aux distorsions temporelles ?
La Guerre Eternelle est un roman incontournable, un de ses ouvrages dont on parvient difficilement à s’arracher de la lecture, une œuvre qui montre combien la science fiction, au-delà de son aspect de divertissement, peut toucher à l’universel…
Jeremy BLAMPAIN |